Financement de l’immobilier hôtelier : des évolutions

12 | 03 | 2019
Financement de l'immobilier hôtelier : des évolutions
Un secteur attractif

L’hôtellerie continue de séduire en France et attire un vaste panel d’investisseurs, qu’ils soient institutionnels ou indépendants, structurés ou opportunistes.
Activité économique étroitement liée à la valeur de l’immobilier, l’hôtellerie repose le plus souvent sur un actif tangible, de nature à rassurer les financeurs et favoriser leur créativité dans des montages complexes (dettes / mezzanine et produits structurés équivalents / fonds propres).
Par ailleurs, le secteur du tourisme en France reprend globalement des couleurs après quelques années plus difficiles. Les prévisions favorables de croissance annuelle long-terme reposent sur des tendances de fond : développement du tourisme international (+3,3% de croissance mondiale annuelle jusqu’en 20301), généralisation des transports low-cost, organisation d’événements internationaux d’envergure (coupe du monde de rugby 2023 ou les jeux olympiques 2024).
Enfin, l’hôtellerie offre un couple risque/rendement résilient comparativement à d’autres classes d’actifs, et repose sur un métier de services qui, plus que d’autres, peut sembler aisé à appréhender. Parallèlement, l’offre hôtelière se réinvente et continue à s’adapter aux nouvelles tendances de consommation favorisant l’émergence d’opérateurs plus innovants.

 
Des données chiffrées qui témoignent de l’intérêt structurel du secteur au plan européen

Après un pic enregistré en 2014 à 24 Mds d’Euros, le volume des transactions hôtelières en Europe se maintient autour des 20 Mds d’Euros sur 2017 et 2018, en hausse de près de 20% par rapport à 2016. Selon la société STR, l’hôtellerie européenne a enregistré la plus forte progression (+4%) de chiffre d’affaires hébergement dans le monde en 2018. Des taux de croissance à deux chiffres (10%-12%) sont observés en Belgique, en Bulgarie et en Lettonie suivis par les Pays-Bas, l’Irlande, la Grèce et la Croatie qui affichent des progressions soutenues (de 6% à 9%). 
Grâce à des fondamentaux solides et à une évolution constante des concepts, l’hôtellerie s’ouvre donc à de nouveaux investisseurs sous diverses formes: Club Deal, Joint-Venture, prise de participation, financement…

 
Les acteurs du financement des projets hôteliers en France

En France, dans un contexte d’afflux massif de capitaux vers l’immobilier (7,2 Md€ de collecte pour les SCPI2 et OPCI3 grand public en 2018 contre plus de 10 Md€ en 20174) et de taux d’intérêt toujours très attractifs, cette classe d’actifs enregistre une part croissante dans l’allocation des portefeuilles institutionnels à la recherche de diversification et de rendement.
Pour cette typologie d’investisseurs ciblant un rendement supérieur au simple rendement locatif, l’exposition au fonds de commerce à travers l’émergence de contrats de gestion qualifiés  « d’inversés » permet de viser une rentabilité supérieure, sans être exposé au portage salarial.   
Suivant les caractéristiques des projets hôteliers (structuration juridique, immobilier/fonds de commerce, portefeuille ou unitaire…), les porteurs de projet peuvent avoir recours à différents types de prêteurs dans le cadre de leur financement. 
– Acteurs historiques, les banques spécialisées et banques d’investissement demeurent les principales sources de financement sur les transactions complexes, avec recours (prêt corporate, émission obligataire, titrisation) et sans recours (dette mezzanine). A titre d’exemple, un portefeuille de 20 hôtels au Royaume Uni (sous marques Crowne Plaza et Holiday Inn) fait l’objet d’un financement à travers l’émission de titrisation adossée à des créances hypothécaires commerciales (CMBS) d’un montant de 427 M£.
– Des acteurs plus récents (fonds spécialisés) proposent une large palette d’instruments financiers (en capital ou en dette) pour accompagner le financement de projets hôteliers et touristiques. Ces financements « sur mesure » destinés aux acteurs institutionnels ainsi qu’aux PME viennent dans certains cas en complément d’un financement de Bpifrance. C’est par exemple le cas de la levée de fonds réalisée par France Hostels pour accompagner son développement5 ou encore la Société Les Bains6 qui a eu recours à une émission obligataire de 15 M€ auprès de Zencap AM.   
Plus récemment, la création de plateformes de financement visant à lever des fonds auprès de particuliers s’inscrit comme une alternative au crédit classique. Si cette solution de financement (plafond à 5 M€) ne peut se substituer à un financement immobilier important, elle permet de bénéficier d’un prêt (court ou moyen terme) auprès du public et de mesurer ainsi l’intérêt du projet auprès des prêteurs.

 
L’importance d’une analyse projet

Le financement d’actifs existants bénéficiant d’un historique de performances reste moins risqué, donc plus accessible. La composante immobilière d’un projet touristique, par nature monovalent, lui confère un certain degré de liquidité (garantie pour le prêteur) qui varie en fonction de sa localisation et de ses caractéristiques.
Le développement de projets dans des destinations saisonnières (montagne ou littoral) rend leur modèle économique plus sensible aux aléas, tant extérieurs (météo, grèves, vacances scolaires/ponts…) que propres à l’exploitation (période d’ouverture limitée dans certaines zones, recrutement de saisonniers, prépondérance de la clientèle de loisirs…). Sur ces destinations, deux facteurs peuvent atténuer le risque d’exploitation : bénéficier d’un actif de grande capacité (effet de volume permettant de mieux absorber les coûts fixes), ou exploiter plusieurs établissements dans un périmètre géographique restreint (synergies au sein du personnel des fonctions support, transfert du personnel saisonnier entre les destinations « montagne » et « littoral »).

 
Etre bien accompagné, un facteur clé de succès

En amont du financement de ces projets touristiques saisonniers – dont le ratio risque/rendement est généralement supérieur aux hôtels urbains – une analyse du marché, du projet, des projections financières et de la qualité du gestionnaire sont autant de fondamentaux qui permettent d’en apprécier la faisabilité économique. Pour le développement de ces infrastructures touristiques nécessitant des capitaux importants, le financement par recours au crédit-bail immobilier reste l’instrument le plus adapté.
Forts d’une double compétence regroupant des spécialistes des opérations de haut de bilan et de l’hôtellerie, les équipes In Extenso accompagnent au quotidien de tels projets. En Juillet 2018, In Extenso conseillait ainsi Le Groupe Labruyère dans sa prise de participation au sein de H8 Collection. Cet investissement s’inscrivait dans la stratégie à long terme du groupe Labruyère visant à créer de la valeur dans des nouveaux métiers.

 

 

Alban BOITEL
Directeur
In Extenso Finance & Transmission
Julien GUITTET
Director
Hotel Real Estate Advisory Deloitte In Extenso TCH
 

 

 

1) UNWTO Highlights 2016
2) Société Civile de Placement Immobilier
3) Organisme de Placement Collectif Immobilier
4) Source : IEIF
5) Augmentation de capital de 3,3 M€ réalisée en janvier 2018 auprès de Bpifrance (via son fonds France Investissement Tourisme) et Extendam (acteur du capital investissement en Europe, spécialiste de l’investissement dans le secteur Hôtellerie – Source – Bpifrance)
6) Zencap AM, investisseur et arrangeur, a structuré une émission obligataire hypothécaire de 15 M€ dans la Société Les Bains. Cette solution de financement adaptée vise à renforcer les moyens de développement en France et à l’international. 

 

 

FUSIONS & ACQUISITIONS MAGAZINE n° 302 | MARS-AVRIL 2019 

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