Interview de Alexis Janin, Head of SMEs – Listing France chez Euronext

08 | 01 | 2025

Interview de Alexis Janin, Head of SMEs – Listing France chez Euronext

Euronext est la première place boursière en Europe avec plus de 1 800 entreprises cotées représentant 6 000 milliards de capitalisation boursière dans sept pays. Dotée de quatre marchés différents (Euronext Access, Euronext Access+, Euronext Growth et Euronext), elle dispose de trois bureaux à Paris, Lyon et Nantes. Sur l’année 2024, il y a eu 53 nouvelles cotations sur Euronext dont 8 introductions en bourse sur Euronext Paris.

🗸 Quels sont les éléments marquants de 2024, positifs comme négatifs (performance, liquidité, mobilisation de place…) ?

L’année 2024 a été marquée, notamment suite aux élections européennes, par l’apparition d’une prime de risque sur l’Europe, puis d’une prime de risque supplémentaire sur la France après la dissolution de l’Assemblée nationale de mai.

Les investisseurs institutionnels ont depuis privilégié une surpondération de la zone US, arbitrant les actions européennes. Sur la cote française, les performances restent globalement corrélées en 2024 au niveau de capitalisation. Le CAC 40 termine ainsi à -2,2%, le CAC Mid & Small à -5,9% et le CAC Small à -8%. Les fonds actions, et particulièrement les fonds Small et Mid ont finalement connu une année de décollecte nette, après de premiers signes très encourageants de recollecte au printemps. Dans le sillage de la surperformance des small cap américaines (Russell 2000 à +9,7%) sur le dernier semestre par rapport aux grandes sociétés (S&P500 à +6,8% , et Nasdaq 100 à +5%), il existe une très belle marge d’appréciation des valeurs small et mid françaises en 2025. Ce rattrapage sera conditionné à l’évolution prochaine de notre environnement continental, qu’il soit politique, géopolitique ou économique.

D’autres éléments nous rendent d’ailleurs optimistes sur ce front. L’année 2024 a été une année charnière en Europe, et en France, avec de nouveaux chocs de simplification qui marquent une avancée décisive dans la modernisation des marchés de capitaux.

La loi Attractivité, et la transposition du Listing Act, ont par exemple permis de fluidifier les opérations de levée de fonds, d’introduire les droits de vote multiple et l’optionnalité de la tranche Retail pour les futures IPO, mais aussi d’élargir considérablement le nombre de sociétés éligibles au PEA PME (de 365 à 589). Concernant le fléchage de l’investissement, des initiatives prometteuses ont été activées ou créées. Ainsi, le lancement en octobre du fonds « CDC Croissance Sélection PME » doté de 500 M€, va permettre de vivifier le segment des smalls et mid cap via son intervention en fonds de fonds qui permettra de démultiplier cette somme. Par ailleurs, le fonds « CDC Tech Premium » destiné à accompagner les IPO françaises et européennes a participé à Paris à ses deux premières opérations en tant qu’investisseur stratégique aux côtés d’Exosens et Planisware.

🗸  Quel est le bilan de l’année 2024 en termes d’opérations sur Euronext ?

En Europe, l’année 2024 se solde avec une amélioration par rapport à 2023. La place parisienne enregistre quant à elle 8 nouvelles cotations. Le solde net est cependant négatif en France. Ce phénomène de concentration de la cote s’est accéléré depuis la période Covid.  Alors que les petites et moyennes capitalisations ont longtemps surperformé les très grandes valeurs grâce à des perspectives de croissance supérieures (le CAC Mid & Small a battu le CAC 40 seize fois entre 2000 et 2020) la période récente a été défavorable aux valeurs moyennes. Cependant, comme je l’évoquais à l’instant, il n’y a pas de fatalité. Les exemples italiens et suédois illustrent que des dispositifs adaptés peuvent renforcer la capacité des marchés de capitaux à financer l’économie réelle et à soutenir un tissu économique diversifié et résilient. Entre 2019 et 2024, l’Italie a enregistré 187 introductions en bourse (dont 173 réalisées par des PME-ETI), tandis qu’en Suède, 197 IPO ont été réalisées sur la même période (dont 184 PME-ETI).

🗸 Dans le contexte actuel, la bourse a-t-elle encore une place auprès des dirigeants de PME et ETI ?

Les échanges de plus en plus fournis de nos équipes, et des conseils de la place, avec les dirigeants ces 18 derniers mois nous convainquent que « oui ». Et sans doute de manière plus prégnante encore aujourd’hui. Dans un environnement économique et financier bien plus complexe, les dirigeants perçoivent de manière évidente tout l’intérêt de la « boite à outils » boursière. La nature des discussions avec leurs partenaires financiers, que ce soit en capital, ou en dette, ont profondément changé ces derniers semestres.La Bourse leur apparait comme le seul outil qui leur offre à la fois des moyens financiers au service de la croissance de l’entreprise, de l’indépendance stratégique, et ce avec un horizon de temps dégagé.

🗸  Que peut-on attendre en termes d’opérations pour 2025 ? 

Avec le cycle de baisse des taux désormais enclenché notamment en Europe, les marchés actions sont plus dynamiques. 2024 aura été une année solide en termes de montant levés et de blocs cédés. Cette tendance positive a d’abord bénéficié aux grandes valeurs qui offre une liquidité élevée. Depuis la fin d’année 2024, cela profite également aux valeurs moyennes. Pour l’année qui se dessine, nous attendons un renforcement des grandes tendances de 2024, et une amélioration du nombre des opérations :

– Tout d’abord la qualité des actifs proposés aux investisseurs restera clé. La croissance rentable sera un facteur de succès des futures IPO.
– Ensuite, on pourra observer la multiplication des sorties des actionnaires financiers via les marchés de capitaux. Les acteurs du capital privé devront accélérer fortement la rotation de leurs portefeuilles cette année, et devraient venir plus nombreux utiliser le continuum de financement offert par la Bourse. Les succès des opérations de Planisware et Exosens, mener par Ardian, et HLD, vont les y inciter.
-Pour finir, les succès des opérations de fin d’année notamment de LIghtOn et d’Odyssée Technologie, le retour des IPO de small cap devrait s’amplifier.

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